Bernard Ramanantsoa, HEC Paris : « On a fait le job ! »

Le directeur emblématique de HEC Paris quitte ses fonctions, retraite oblige. Il revient sur son parcours et en profite pour nous donner sa vision des grandes écoles ainsi que des managers qui y sont formés.

« Un regret ? Peut-être de ne pas avoir été plus proche des étudiants. Mais c’est très difficile quand on dirige HEC Paris. » C’est au fond le seul bémol que Bernard Ramanantsoa, le futur-ex directeur général, admet quand il regarde dans le rétroviseur. Celui qui quitte ses fonctions dans quelques semaines part sur un bilan plus que positif à lire les classements internationaux (à commencer par le nôtre). « En 20 ans, j’ai l’impression qu’avec mon équipe on a fait le job pour propulser notre maison au sommet de la hiérarchie des business schools mondiales. »

Les chiffres sont d’ailleurs clairs : triplement du budget, une collecte de fonds qui dépasse les 100 millions € en cinq ans et un effectif multiplié par trois en 20 ans !

Respect

Deux décennies après sa prise de fonction, ses étudiants sont encore et toujours les meilleurs candidats des prestigieuses classes préparatoires. Mais leur profil a quelque peu évolué. Les fortes têtes des années 1990 ont laissé la place à des personnalités connectées, qui ne connaissent plus les frontières. « C’est d’ailleurs l’une des principales transformations que j’ai connues. Nos élèves attendent de nous des opportunités de mobilité sur la planète, durant leurs études, mais également une fois diplômés. » Et d’ajouter : « Ils ont vécu une révolution digitale unique. Ils n’ont plus besoin de nous pour échanger, dialoguer, suivre leurs cours, vivre dans les réseaux… Le rôle d’une école est juste de leur offrir les fondations pour construire la suite. » Seule chose au fond qui n’a pas changé : le respect. « Quand les élèves me parlent, il n’y a aucune familiarité », s’amuse-t-il. Ce qui n’empêche pas cet élégant sexagénaire de se mettre en scène dans des vidéos délirantes produites par ses étudiants chaque fin d’année !

Notoriété

Quand en 1995, la CCI Paris Île-de-France lui confie les clés de la boutique, Bernard Ramanantsoa est alors doyen du corps professoral. Il succède à une star des médias, Henri Tézenas du Montcel. Ce diplômé de SUPAERO, spécialiste de stratégie et d’origine malgache, surprend tout le monde en prenant la tête d’une institution réservée normalement aux apparatchiks. Quelques mois après son arrivée, il part aux États-Unis rencontrer les deans des plus grandes universités, histoire d’évaluer la notoriété de l’école et étudier leur manière de gérer une grande fac made in USA. « Je me suis rendu compte qu’il y avait un gap énorme entre eux et nous. Et pas uniquement sur le plan budgétaire. » Normal donc qu’il soit particulièrement fier de ses doubles diplômes proposés désormais avec le MIT ou la NYU.

À quelques semaines de quitter son bureau de Jouy-en-Josas, il se voit bien entre deux continents. D’un côté, pour aider Madagascar. De l’autre, pour quelques résidences académiques aux États-Unis. Sans doute aidera-t-il également à renforcer la notoriété de nos grandes écoles de commerce, ici en France. « Car c’est assez paradoxal. Chez nous, nous sommes finalement assez critiqués et l’État ne veut pas investir, alors que nous sommes une composante importante de notre compétitivité. J’espère qu’avec le temps, nos politiques vont s’en rendre compte. » Comme quoi, nul n’est prophète en son pays… y compris les meilleurs.